L’article 67 de la loi du 21 décembre 2022 a réintroduit la possibilité pour les entreprises de conclure, à titre expérimental, un seul contrat, CTT ou CDD, pour assurer le remplacement de plusieurs salariés absents, successivement, ou de manière concomitante (par exemple deux temps partiels).
Ce dispositif, dérogeant à la règle « un seul CTT ou CDD pour un seul remplacement », est établi, à titre expérimental, pour 2 ans, à compter de la publication du décret d’application au J.O., soit du 13 avril 2023 au 13 avril 2025. Les secteurs d’activité concernés ont été étendus à plus de 60 conventions collectives. Citons, entre autres :
- La convention de la plasturgie ;
- La convention de l’hospitalisation privée ;
- La convention du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire ;
- La convention des transports routiers et activités auxiliaires du transport ;
- La convention des 5 branches industries alimentaires diverses ;
- La convention des entreprises de propreté ;
- La convention collective des grands magasins et des magasins populaires…
Le véritable démarrage de cette expérimentation amène certaines questions pratiques, auxquelles le ministère du travail a répondu par le biais d’une FAQ publiée sur son site. Nous avons relevé ou regroupé certaines d’entre elles et les réponses apportées :
Est-il nécessaire d’identifier les salariés remplacés ?
Oui, les noms de tous les salariés absents et leur qualification doivent figurer sur le contrat de travail du salarié remplaçant, ainsi que le terme de chaque remplacement. Les dispositions législatives sur le formalisme du contrat (CTT ou CDD) s’appliquent, aucune dérogation au droit commun en matière de formalisme des contrats n’étant possible. Ainsi, la durée du contrat ne devra pas excéder 18 mois, renouvellement compris (sauf accord de branche étendu).
L’employeur peut-il, au fur et à mesure, ajouter des salariés permanents à remplacer et, dans cette hypothèse, que se passe-t-il si le salarié remplaçant refuse cet ajout ?
Si le contrat initial n’a été établi que pour remplacer un seul salarié absent, un avenant doit être conclu avec le salarié en CTT ou CDD, le nom et la qualification de la nouvelle personne (ou des nouvelles personnes) à remplacer devant y figurer. Si le salarié refuse de signer cet avenant, le contrat initial continue à produire ses effets jusqu’à son terme (pas de rupture anticipée du contrat possible) et l’employeur (l’agence d’intérim dans le cas du CTT) devra apporter une solution pour remplacer le nouveau salarié permanent absent (nouveau contrat « classique » avec un autre salarié remplaçant).
Est-il possible de conclure un seul CTT ou CDD multi-remplacement, intégrant une période sans activité entre deux remplacements ?
Non, l’expérimentation a pour objet de remplacer des salariés dont les absences sont concomitantes ou immédiatement successives. Il n’est donc pas question de conclure un contrat pour remplacer plusieurs salariés absents avec des périodes d’inactivité, car nous serions alors dans un système d’activité « à la demande », contraire à la règle selon laquelle un CTT ou un CDD ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire. Toutefois, il est toujours possible de conclure un nouveau contrat avec le même titulaire pour le remplacement d’un autre salarié dont l’absence débute postérieurement au terme du premier contrat.
Les missions de remplacement doivent-elles se situer dans le même secteur géographique ?
Non… en principe, car aucune disposition n’étant prévue sur ce point, les missions peuvent se situer sur un même lieu de travail, ou des lieux différents. La prudence est toutefois ici de mise, sachant que le salarié remplaçant doit pouvoir se rendre sur son lieu de travail sans contrainte ni difficulté particulière. Autant les déplacements sur un même site ne posent aucun problème, autant ceux nécessitant des parcours longs entre plusieurs sites sont à éviter.
Le contrat de remplacement doit-il être conclu pour le même type d’absence ?
Non, le texte de loi ne conditionne par l’accès au multi-remplacement à un seul type d’absence (par exemple des congés payés successifs). Ainsi, des motifs d’absence différents peuvent se succéder : par exemple le remplacement pourra être dans un premier temps pour congés payés, puis pour formation, puis pour congé de maternité ou de paternité. L’obligation porte sur l’identification précise de chaque remplacement, c’est-à-dire un motif d’absence tel que fixé par la législation encadrant le recours aux CTT ou aux CDD.
Doit-on établir autant de bulletins de salaire qu’il y a de remplacements simultanés ?
En principe, non, le droit commun s’applique : un seul bulletin par période de paie, lequel devra permettre de distinguer le salaire correspondant à chaque poste occupé. Toutefois, si les postes comportent des différences importantes, il sera possible d’établir un bulletin de salaire par poste, pour une meilleure lisibilité.
Rappelons que cette expérimentation est présentée comme un outil pour lutter contre la précarité et les contrats trop courts, restant entendu qu’elle ne peut avoir ni pour effet, ni pour objet, de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Des précisions seront à apporter au fil de la mise en place du dispositif.