Dans un précédent billet daté du 6 juillet 2020, nous avions développé les mesures gouvernementales exceptionnelles assouplissant les règles encadrant le prêt de main d’ œuvre, dans le contexte de crise sanitaire.
Rappelons que pour écarter le but lucratif d’un prêt de main-d’œuvre (et donc son caractère illicite), le montant facturé à l’entreprise utilisatrice ne doit être ni inférieur, ni supérieur au montant supporté par l’entreprise prêteuse. Or, le dispositif instauré par la loi du 17 juin 2020 a prévu, pour certains secteurs d’activité, la possibilité de ne pas facturer la totalité du coût de mise à disposition par l’entreprise prêteuse (par coût, il faut entendre salaires, charges sociales afférentes et frais professionnels remboursés au salarié prêté). Les points particuliers sur lesquels la loi déroge au droit commun ont été développés dans le billet précité. Nous n’y reviendrons pas.
Restait à connaître les secteurs d’activité concernés. C’est désormais chose faite par la publication du décret du 30 octobre 2020 permettant à 4 grands secteurs d’activité « particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation et à la continuité de la vie économique et sociale », de bénéficier du dispositif. Il s’agit des secteurs :
- social et médico-social
- construction aéronautique
- l’industrie agro-alimentaire
- transports maritimes
Un commentaire s’impose : il est aisé de comprendre que ce prêt de main d’œuvre hors norme autorise une sous-facturation, voir même une facturation nulle, permettant à l’entreprise utilisatrice d’économiser des salaires. Nous ne devons pas pour autant parler de but lucratif, si l’on se réfère aux trois objectifs « historiques » qui justifient le recours au prêt de main d’œuvre :
- permettre à l’entreprise utilisatrice une meilleure qualification de sa main-d’œuvre,
- favoriser les transitions professionnelles
- constituer un partenariat d’affaires ou d’intérêts communs.
Nous pourrions y ajouter, covid-19 oblige, un quatrième objectif : éviter à l’entreprise prêteuse de mettre en chômage partiel certains de ses salariés, voire les licencier pour motif économique.
Mais, en même temps, ne nous cachons pas la face avec ce dispositif exceptionnel qui, affirme-t-on dans un bel élan de solidarité, permet à une entreprise affrontant une baisse d’activité de prêter, avec beaucoup de facilités, du personnel à une autre entreprise qui a des besoins en profils déjà formés et opérationnels.
« Il s’agit donc d’un échange de bons procédés grâce auquel chaque partie trouve son compte »
Communiqué du ministère de l’économie, des finances et de la relance.
Voilà qui a le mérite d’être direct. Ça l’est tout autant, si l’on se réfère à certaines organisations professionnelles qui encouragent leurs adhérents à recourir au prêt de main d’œuvre permettant « de ne pas recourir au CDD et à l’intérim ». Don’t act…
Pour l’heure, aucun bilan ne nous est parvenu sur ce dispositif devant prendre fin le 31 décembre (sera-t-il prolongé au-delà ?). Nous n’avons pas plus d’informations sur les contrôles éventuels, sachant que le ministère du travail, moteur du dispositif et soucieux de sécuriser les choses, a rapidement mis en ligne les deux modèles de convention de prêt de main-d’œuvre et d’avenant de mise à disposition, dont il est vivement conseillé de s’inspirer.
Nous ne manquerons pas de vous informer sur ces points, gardant à l’esprit que le dispositif a vocation à rester « temporaire ».